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soirée du mardi 8 février
2011
accueil des élèves qui ont intégré une école parisienne en 2010
conférence de
Pierre ALLEMAND et participation à une répétition de l'Orchestre de Paris
compte-rendu de la soirée
Mélomanes, les Parisiens, Anciens de Claude-Fauriel, se sont
retrouvés, le 8 février en fin d’après midi, au sous-sol d’une brasserie, tout
près de la salle Pleyel. Les y attendaient Christian Volle, Président du Groupe
de Paris, ainsi que Barbara et Pierre Allemand. Les ont également rejoints
M. Alain Mattone, proviseur du lycée et plusieurs élèves de prépa qui ont
intégré des grandes écoles parisiennes à la rentrée 2010 et se sont présentés au
cours de la soirée :
·
Laetitia MERLIN (POLYTECH PARIS SUD
MATÉRIAUX)
·
David PEYROT (SUPOPTIQUE)
·
Laure SYSTCHENKO (SKEMA PARIS)
Christian Volle a chaleureusement présenté le conférencier du
jour, Pierre Allemand, ancien contrebassiste-tuttiste à
l’Orchestre de Paris. Fils du grand conservateur Maurice Allemand (il a donné au
Musée d’Art et d’Industrie de Saint-Étienne la dimension qui est la sienne et
initié, dans un contexte peu ouvert sur l’art contemporain, les collections de
ce qui est devenu, à la Terrasse, le Musée d’Art Moderne). Pierre Allemand a été
élève du Lycée Claude-Fauriel entre 1948 et 1955. Il s’est formé dans une
nombreuse fratrie de musiciens et d’artistes, est devenu professionnel en 1960
et a rejoint en 1967 (après 2 ans et demi à l’Orchestre de Bordeaux) pour 34
ans, le prestigieux Orchestre de Paris. Par ailleurs, au-delà de cet orchestre
et même hors de nos frontières, Pierre Allemand s’est investi dans la défense
des intérêts des artistes musiciens, dans les droits de propriété intellectuelle
des artistes interprètes (utilisations diverses de leurs enregistrements – Loi
Lang de 1985 pour la France), dans la longue préparation de la Convention
internationale sur la diversité culturelle (Unesco, octobre 2005), etc.,
participant également à de nombreuses conférences dans les domaines de la
culture et de la musique.
Élégant et modeste tout au long de la soirée, Pierre Allemand a
dressé un portrait tout en finesse de la France musicale et de ses orchestres ;
un portrait constamment confronté tant aux réalités économiques du financement
qu’aux réussites d’autres pays (Allemagne, Autriche par exemple, où dans le
domaine de la culture musicale il est possible de relever une différence. En
France, tout de même, quelque 2500 instrumentistes, dont 700 à Paris, de
formation classique vivent de leur art (sans compter les chambristes et
concertistes, ni les enseignants des très nombreux conservatoires); ils sont
répartis dans un peu plus de 30 orchestres permanents (y compris ceux qui font
du lyrique), sont de très bonne qualité dont 8 excellents à Paris et dont 2
(l’Orchestre de Paris et l’Orchestre National de France) se placent au niveau
des plus réputés dans le monde contre 7 en Allemagne, 6 aux États-Unis, 3 en
Grande Bretagne, 2 en Autriche, 2 en Russie, 2 en Suisse, 2 au Japon, 1 aux
Pays-Bas, 1 en République Tchèque, etc. Une dizaine d’autres formations
importantes, de divers niveaux qualitatifs, de nombreux orchestres de chambre et
des ensembles de musique contemporaine animent également la vie musicale
« classique » en province et à Paris. On peut ainsi compter quelques centaines
d’Orchestres et de chefs d‘orchestre dans le monde et encore plus de
concertistes instrumentistes et lyriques.
Pierre Allemand a parlé rapidement de l’Orchestre de la Société
des Concerts du Conservatoire fondée en 1828 par François-Antoine Habeneck,
grâce à un décret ministériel et l’appui de Luigi Cherubini (directeur du
Conservatoire) ; dès ses débuts les critiques musicaux anglais ou allemands ont
considéré que c’était à Paris, avec cet orchestre, que Beethoven était le mieux
interprété ! Cet ensemble de 70/80 musiciens avec un chœur professionnel de même
importance (supprimé en 1925) a été dirigé ensuite par 11 autres chefs dont
André Messager, Charles Munch et André Cluytens. Cet orchestre a fait, entre
autres, une tournée triomphale aux États-Unis, restée historique, de plus de 3
mois, d’octobre 1918 à janvier 1919. Parmi ses autres déplacements il faut citer
le concert donné à Saint-Étienne le 12 mars 1930.
Ensuite notre conférencier a tout particulièrement évoqué
l’histoire de l’Orchestre de Paris (composé de 120 musiciens) auquel est
adjoint un chœur amateur de grande qualité (de 140 membres environ) créé en 1976
par Arthur Oldham à la demande de Daniel Barenboïm. L’Orchestre de Paris,
héritier de la Société des C. du C., a été créé en 1967 par Charles Munch, sous
l’impulsion d’André Malraux et de Marcel Landowski. Pierre Allemand a fait
défiler devant nous, avec un mot pour chacun, les chefs titulaires qui ont
marqué l’Orchestre de Paris : les Munch, von Karajan, Solti, Barenboïm, von
Dohnanyi, Eschenbach jusqu’au directeur musical actuel, l’estonien Paavo Järvi.
Les rapports exigeants et complices entre le chef d’orchestre et ses
instrumentistes et par ailleurs entre le chef et le public nous ont été, pour
notre plus grand plaisir, décrits « de l’intérieur ». Il a parlé aussi, mais
brièvement, des chefs invités et solistes parmi les plus réputés au niveau
international qui se sont produits avec l’Orchestre de Paris et des nombreux
enregistrements faits depuis 1967. Il a rappelé que la Société des Concerts du
Conservatoire avait eu tout au long de son existence depuis 1828 une politique
relativement prestigieuse aussi (surtout au XXème siècle) et qu’elle avait
réalisé des centaines de disques depuis 1918.
Pierre Allemand a aussi signalé qu’il avait créé une association
pour célébrer très officiellement en 1978/79 le cent-cinquantième anniversaire
de la création de la Société des Concerts du Conservatoire en organisant avec la
Bibliothèque Nationale une exposition qui a été présentée en 4 lieux différents
à Paris et 3 concerts : un au Centre G. Pompidou, un autre, le plus officiel,
avec l’Orchestre de Paris dirigé par Daniel Barenboïm, avec Isaac Stern en
soliste, à la Salle du Conservatoire (l’ancien, dans le 10ème
arrondissement) et le dernier à la Sacem avec 17 heures de musique (!) dans 3
salles différentes de 18h à 2h du matin !
Entre mille autres choses, nous avons appris :
· que
les « tuttistes » d’un orchestre sont les
instrumentistes non solistes qui jouent les instruments à cordes (quatuor) ;
tous les autres musiciens de l’orchestre sont des solistes à divers niveaux de
responsabilité. Le mot « tutti » indique « tous, tuttistes », en opposition à
« solo ou soli » indiquant « seul(s) » ; dans la forme musicale du « concerto
grosso » fin XVIIème siècle, le « tutti » répondait musicalement au « solo ou
aux soli ». La musique italienne, ayant joué un grand rôle en Europe à cette
époque (et avant même), il en est resté tout un vocabulaire toujours utilisé
aujourd’hui. Le « tutti » veut dire aussi « tous les instrumentistes » d’un
orchestre.
· que
la « Philharmonie de Paris », grande salle de concert (2400 places), centre d’un
ensemble de « services musicaux » dans le Parc de la Villette, destinée à
l’Orchestre de Paris et à recevoir des orchestres invités, se ferait, enfin, bel
et bien (ouverture en 2013 ou 2014).
· que
le budget de l’Orchestre de Paris reposait en gros pour 20% sur des recettes de
billetterie, etc. et pour le reste sur une subvention de 15 M€ environ (taux de
2008) partagée entre l’État (60%) et la Ville de Paris (40%).
· que
Gabriel Fauré aurait composé son Requiem sans raison majeure (ce n’était pas une
commande) mais pour se faire plaisir car il était « fatigué » de jouer sans
cesse les mêmes œuvres pour orgue qu’il était tenu de donner dans le cadre de sa
profession d’organiste à cette époque ; les musicologues ont tout de même tenté
un rapprochement entre la mort de ses parents et la composition de la première
version de cette œuvre qui est intervenue peu de temps après ces évènements
familiaux.
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Peu avant 20h, clou de la soirée, l’assistance s’est transportée,
quelques pas plus loin, Salle Pleyel, pour la générale du concert Fauré des 9 et
10 février, concert dont le Monde (11/02/2011) a rendu compte. Dans la
splendide Salle Pleyel rénovée (2000 places !), dans un silence religieux, Paavo
Järvi était à la manœuvre avec des interprètes -choeurs et musiciens- sans leurs
robes longues ou fracs : sous nos yeux, à nos oreilles, la musique –Pavane
pour chœur et orchestre, Élégie pour violoncelle et orchestre ou Cantique
de Jean Racine- s’élaborait, dans la ferveur, sous la baguette du chef….
Tard dans la soirée, à l’issue du dîner amical, il ne restait
plus à Pierre Allemand qu’à tenter de faire face au flot de questions d’un
auditoire captivé (enseignement musical en France etc.). Pierre Allemand a été
chaleureusement remercié et applaudi pour son humour, sa simplicité et la
passion qui l’anime toujours.
Jean-Paul Véziant
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