samedi 5 juin 2004
Visite d'une usine de déshydratation de luzerne
La luzerne à l’attaque de la malnutrition
compte-rendu de la visite
Pour découvrir le conditionnement de la luzerne
et ses potentialités nutritives, le Groupe de Paris de l’ « A » a organisé la
visite de l’usine de déshydratation de la luzerne d’Aulnay-Aux –Planches. La
visite de la cave de Champagne Pommery a bien clôturé la journée.
Exposé sur la déshydratation de la
luzerne - visite de l'usine
À 10 heures, une quinzaine de membres du Groupe Paris sont
accueillis par Michel Séjourné, Président de la Coopérative,
qui nous fait un exposé sur la déshydratation de la luzerne.
La première usine de déshydratation fut implantée en
Normandie en 1950 par Louis Renault qui, ayant constaté un problème de séchage
au soleil, conçut un procédé de séchage artificiel. En effet, la déshydratation
rapide préserve les qualités naturelles de la luzerne. L’automatisation des
processus de déshydratation permet de réguler les températures d’entrée et
sortie du séchoir. Toutes les unités sont équipées de refroidisseur garantissant
une parfaite stabilité du produit fini.
La Champagne crayeuse, autrefois appelée pouilleuse, dispose
d’un sol crayeux sur une épaisseur d’environ 20 cm qui repose sur du grès. Ce
sol, pauvre à l’origine, a besoin d’être soigné et d’avoir une rotation de têtes
d’assolement -betterave, luzerne- ce dernier étant un excellent régénérateur des
sols. Le PH basique de la craie lui donne un atout non négligeable. La luzerne,
plante pérenne, a un système racinaire qui s’étend à l’horizontal sur plusieurs
mètres. Il permet une grande rétention d’eau, capte l’azote de l’air et pompe
l’azote des sols. Ce qui est très positif pour l’environnement car il diminue la
teneur en nitrates des sols. On peut la récolter jusqu’à 4 à 5 fois par an. La
récolte démarre fin avril et se termine fin octobre. Hors les périodes de
récolte, l’usine travaille la betterave et effectue l’entretien des machines.
La coopérative d’Aulnay appartient au Groupe « France
Luzerne » (18 coopératives). Elle a été créée en 1968, compte 460 adhérents,
représente une surface de luzerne de 7.000 ha, et a pour rayon d’action la
plaine d’Epernay-Sézanne. Pour raisons économiques, les deux sites ont été
regroupés en un seul en 2003. Le personnel se compose de 43 permanents et
19 saisonniers. L’usine traite 4.000T/jour de luzerne. Le chiffre d’affaires
1995 était de 100 MF. La coopérative commercialise ses produits via sa filiale VIRIDIS (120 personnes), qui travaille sur des composés et effectue des
recherches sur les valeurs ajoutées à partir du
concentré appelé PX.
Le coût de transport de la matière verte est important et il
y a peu de charges de structure. La déshydratation est énergivore surtout en
énergie fossile avec d’importants rejets dans l’atmosphère : la part de
l’énergie représente un tiers du coût. L’Union européenne impose sa
réglementation draconienne avec la PAC (politique agricole commune). La
Commission Européenne à Bruxelles avait choisi d’aider le
produit, mais à partir de 1992, c’est la politique de l’aide à la surface qui
est adoptée, sauf pour la luzerne qui est restée dans la le dispositif de subventions d’aide au
produit. Mais on s’achemine sur une aide au producteur sur des bases
historiques et on risque de voir demain un agriculteur recevoir plus d’aide pour
des terrains gelés que pour des terrains exploités … aberration des technocrates..
En France, l’avenir de la luzerne dépendra des besoins en protéine de
substitution.
La voie humide.- Schéma du process : la récolte arrivant par
camion est déversée dans une presse à vis pour l’écraser. Il en sort un jus vert
dans lequel on injecte de la vapeur pour le floculer, ce qui permet de
recueillir la pâte PX et le sérum. La pâte PX est transformée en granulés après
passage dans un fluidiseur. Le séchage du sérum se fait par passage dans 2 fours
(20.000l/h et 30.000l/h) et un sécheur à basse température (100°) de 10.000 l/h.
Le produit de séchage est ensuite broyé et transformé en granulés en partie et
le reste transformé en sérum concentré réinjecté dans la luzerne pressée.
C’est un bel exemple de symbiose agriculture et industrie.
Depuis l’année dernière, la pâte PX est stockée à une
température de 4°. Sur 100T de récolte, on recueille 8T de pâte PX et 42T de
sérum eau. Dans un concentrateur à trois étages, le sérum entre avec 5% de
matière sèche et en sort avec une concentration de 50% de matière sèche.
Les produits obtenus sont essentiellement destinés à
l’alimentation animale pour 95%, le reste est utilisé à des fins
pharmaceutiques ou cosmétiques et pour l’alimentation humaine dans les pays à
population souffrant de malnutrition. Nous sommes dans le registre des extra
foliaires, avec le rubisco protéine blanche qui précipite à basse température.
Après la conférence nous visitons l’usine de déshydratation
où nous sommes tout de suite envahis par des décibels et des arômes de végétal
mouillé. Les tambours de séchage sont impressionnants, les tapis roulants sont
remplis de luzerne hachée.
La luzerne à l’attaque de la
malnutrition
Au déjeuner la parole est donnée à Jacques SUBTIL,
Président de l’APEF (Association pour la Promotion des Extraits Foliaires en
nutrition).
Agriculteur dans la luzerne depuis 1959, il eut l’idée de faire dans les années
1970 un produit à forte valeur ajoutée dérivé de la luzerne.
Il fut aidé dans son initiative par une association anglaise
« Leaf for Life » avec laquelle le professeur Waterlow, le pape de la
malnutrition, avait mis au point un concentré de protéines, le PX. Mais son
produit n’était pas exempt d’effet secondaire, qui se manifestait par des
oedèmes. Il a fallu chauffer le produit (floculation). L’association a été créée
en 1993 par le Professeur Guillou, nutritionniste à la
commission scientifique du CHU Robert Debré de Reims. Il y a 800 millions d’habitants sur la
terre qui souffrent de sous-nutrition et 1 milliard de malnutrition,
c’est-à-dire carencés en vitamines A et en sels minéraux (fer, iode).
Actuellement, les produits dérivés de la luzerne sont en expérimentation dans
certains pays qui souffrent de la faim.
Danielle Fanconi, agricultrice biologiste et son mari,
qui s’intéressent à la luzerne en tant que dérivé alimentaire pour pallier la
faim dans le monde, témoignent des résultats encourageants des expériences en
matière d’extraits foliaires dans les pays où sévit la malnutrition.
En mars 2003, elle a
réuni déshydrateurs, agriculteurs et scientifiques pour
exposer son projet et obtenir leur
adhésion pour un programme complémentaire de recherches avec le Professeur
médecin nutritionniste du CHU de Reims
. Le budget est actuellement de 407.000 € couvert par la Région et l’ANVAR.
La luzerne est un bon moyen
de relancer l’activité, stagnante dans la région, en vue de développements
nouveaux dont des biscuits que nous dégustons.
À noter que
Sœur Lucie, religieuse belge, qui a travaillé
dans les pays en voie de développement et qui aujourd’hui exerce au Nicaragua, a
témoigné des effets bénéfiques des extraits foliaires. Le problème est que le
produit n’a pas encore reçu son accréditation
en France par l’AFSSA (Agence française de sécurité sanitaire des aliments)
pour être commercialisé et qu’il faut se battre pour
l’obtenir. Danielle Fanconi nous signale que l’émission
« Envoyé spécial » consacrera bientôt une rubrique sur ce sujet.
Dans
sa conclusion, Jean Tardy remercie Alain Tirard pour avoir organisé cette visite
qui nous a ouvert les yeux sur les formidables potentialités de la luzerne pour
lutter contre la malnutrition dans le monde.
Il remercie également vivement nos conférenciers et souhaite que le Rotary
International puisse intervenir dans cette action comme il l’a si bien fait dans
l’éradication de la poliomyélite.
Visite des caves de Champagne
Pommery
C’est Jeanne Alexandrine Louise Pommery qui, au décès de son
mari, a repris en 1830 l’exploitation qu’il avait fondée. Cette femme
intelligente et audacieuse eut l’idée de faire construire des bâtiments de style
élisabéthain pour plaire à sa clientèle anglaise et de faire creuser à 30m de
profondeur dans d’anciennes galeries gallo-romaines des caves pour stocker son
champagne à température constante, ceci sur 18 km, auxquelles nous accédons par
un magnifique escalier de 116 marches. Les voies souterraines portent des noms
de villes internationales et 4 salles sont décorées de bas-reliefs du sculpteur
Gustave Navlet. Les caves accueillent également une exposition temporaire d’art
contemporain.
Après la visite, dans un
salon réservé aux invités de marque, un verre de champagne nous est offert dans
un verre œnologique par un charmant Monsieur, responsable du protocole. Nous partons, rassurés cependant
par notre hôte sur notre taux d’alcoolémie bien inférieur au 0,5 g/l fatidique !
Andrée HELLENIS
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Michel Séjourné
et Jean Tardy luzerne en main |
Alain Tirard et Jacques Subtil |
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Jacques Subtil et Danielle Fanconi |
Descente dans les caves Pommery |
cliquez sur les photos pour agrandir
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