Groupe de Paris des Anciens Élèves du Lycée Claude-Fauriel de Saint-Étienne

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soirée du mercredi 25 mars 2009
dîner-rencontre avec Jean-Paul VÉZIANT
  « L'Union Européenne et le gaz russe »

le compte-rendu   photo de la soirée - carte

compte-rendu de la soirée

Compter un diplomate dans ses rangs est une aubaine pour une association. C’est une fenêtre ouverte sur le monde. On est tenté de le solliciter sur de nombreux sujets. C’est le cas du Groupe de Paris des Anciens de Fauriel avec notre camarade Jean-Paul Véziant.

En décembre 2004, souvenez-vous, lors de l’accueil des élèves ayant intégré une école parisienne, notre invité était venu nous parler de « L’ambassadeur et ses métiers ».

Depuis, Jean Paul Véziant a terminé sa carrière diplomatique en exerçant, de 2005 à 2008, la fonction d’ambassadeur à Kiev (Ukraine). Cette dernière expérience, ajoutée à tant d’autres, dont des postes à Moscou ou à Tachkent (Ouzbékistan), lui a donné une position privilégiée pour parler de la géopolitique des flux de gaz naturel entre l’Union Européenne, la Russie, l’Asie Centrale, voire l’Asie.

Sujet complexe ! Mais le Groupe de Paris s’avère décidemment bien entraîné pour aborder ce genre de thème. Et ce 25 mars 2009, en regrettant l’absence de notre président Jean Tardy toujours immobilisé chez lui et qui nous a transmis un message, nous étions une trentaine, jeunes et moins jeunes, sous la houlette de Philippe Barbut et Christian Volle, au FIAP Jean Monnet à Paris. L’assistance s’est montrée passionnément attentive, voire même érudite, en écoutant et questionnant Jean Paul Véziant.

 

Notre conférencier nous a fait entrer dans le vif du sujet en nous distribuant une fiche de synthèse et sept cartes géographiques en couleur, montrant les principaux gazoducs et oléoducs existants ou en projet, les principaux gisements de pétrole et de gaz en Russie, en région caucasienne et en Iran.

 

Les chiffres

 

La consommation de gaz naturel de l’Union Européenne (UE) est aujourd’hui d’environ 600 Mds (milliards) de m3. Elle devrait augmenter de 200 Mds de m3 supplémentaires d’ici 2030. Dans ce volume, le gaz naturel liquéfié (GNL) compte pour 9%.

L’UE importe 62% de sa consommation en gaz naturel. Les trois principaux fournisseurs extérieurs de l’UE sont la Russie (pour 27% de la consommation européenne), la Norvège (pour 16%), et l’Algérie (pour 10%). Les gisements intérieurs à l’Europe (Grande Bretagne, Pays Bas, …) déclinent.

Le mixte énergétique (charbon, gaz, pétrole, uranium) en Europe a quatre utilisations : la production d’électricité (dont 20% en utilisant du gaz naturel), l’industrie (18% gaz), l’usage domestique (20% gaz), les transports (gaz très faible, le pétrole assurant 96%).

 

La sécurité énergétique

 

La sécurité énergétique consiste à avoir de l’énergie de façon fiable, continue, prévisible, et à des prix raisonnables.

20% de gaz en moins entraîne une crise gazière. Parmi les crises gazières, on peut citer, fin 2005, le conflit Russie - Ukraine sur le prix du gaz, le volume fourni et le tarif du transit. Ce conflit a abouti, début janvier 2006, à l’acceptation par l’Ukraine des conditions russes. La même crise s’est reproduite début 2009 sur une durée de 15 jours. Si l’on peut supporter le ralentissement du débit d’approvisionnement du pétrole, grâce à des stockages, on ne peut guère ralentir celui du gaz (très faibles stockages en France). Le géant russe Gazprom (premier exploitant et exportateur de gaz au monde) avait préparé la crise en fermant une centaine de puits.

Plusieurs risques pèsent sur la sécurité énergétique :

·        risques techniques à court terme : accident, défaillance technique, grève, attentat.

·        risque économique : manque d’investissement en capacité, en amont (exploitation) ou en transport. Il n’est pas certain que la Russie pourra fournir : il y a une certaine opacité de Gazprom sur l’exploitation des gisements, les groupes occidentaux sont évincés ou peu associés. D’autre part, les gazoducs sont souvent en mauvais état (autant en Russie qu’en Ukraine) et il y a des pertes en ligne considérables. En mars 2009 à Bruxelles un tour de table a permis de rassembler 2,5 milliards d’euros pour des remises à niveau. La Russie veut contrôler des réseaux de distribution en aval.

·        risque politique : par exemple, la Russie peut préméditer la pénurie pour mettre à genou Kiev.

 

Les acteurs pertinents

 

Outre Gazprom, on peut citer :

·        le « marché » du gaz en général, qui doit permettre d’assurer une bonne régulation

·        les états (entité État et/ou société nationale) :

-        en France : GDF puis Suez-GDF privatisé

-        en Allemagne : les sociétés privées s’émancipent du pouvoir politique (cf. Gazoduc Baltique)

-        en Italie : ENI est en lien avec Gazprom (participations croisées)

-        en Autriche : le hub gazier en Autriche de Baumgarten est sous contrôle de Gazprom, etc.

·        l’Union Européenne : gardienne du marché intérieur de l’énergie (facilitant la concurrence et veillant à séparer la production, le transit et la distribution), compétente pour la politique énergétique à l’extérieur.

 

La présidence française de l’UE (deuxième semestre 2008)

 

Le rapport de M Claude Mandil « Sécurité Energétique et Union Européenne », livré en avril 2008 au Premier Ministre, en vue de la présidence française de l’UE, a préconisé notamment de :

·        parler d’une seule voix (mais il y a une grande diversité des situations entre les pays ; par exemple : place importante du nucléaire en France),

·        diversifier ses sources d’approvisionnement (réduire l’importance de la Russie, faire croitre l’Asie Centrale, l’Algérie, la Norvège, …),

·        diversifier les réseaux d’approvisionnement d’énergie,

·        augmenter l’efficience énergétique de l’UE pour qu’elle soit moins dépendante, …

 

La diversification des routes d’approvisionnement

 

Les principaux gazoducs existants sont :

·        Northern Lights + Yamal / Europe (route : Russie – Biélorussie – Pologne …) : 33 Mds de m3.

·        Urengoî / Oujgorod (route : Russie – Ukraine – Slovaquie – Autriche …) : 110 Mds de m3.

·        Bluestream (route : Russie – Turquie …, en passant sous la Mer Noire) : 18 Mds de m3.

·        BTE ou SCP (route : Bakou – Tbilissi – Erzurum [Turquie]) : 7 Mds de m3 (20 Mds en 2012).

·        Gazoduc Iran – Turquie : 10 Mds de m3.

·        Gazoducs en provenance d’Algérie : 54 Mds de m3.

·        Gazoducs en provenance de Norvège : 86 Mds de m3.

 

Des gazoducs sont en projet, notamment :

·        Nabucco (route : Bakou - Iran – Turquie – Bulgarie – … – Autriche …) : 30 Mds de m; sera réalisé en 2012 / 2013 si décision en 2009, à l’initiative de six pays (sans la France) ayant 16,5 % des parts ; comporte des incertitudes économiques (approvisionnement et rentabilité) et géopolitiques (Iran, …).

·        South Stream (route : Russie – passage sous la Mer Noire - Bulgarie … puis bifurcation vers Autriche et vers Grèce – Italie) : 30 Mds de m; évite l’Ukraine ou la Turquie (qui pourraient imposer certaines exigences), mais accroît la dépendance par rapport à la Russie.

·        Nord Stream / Gazoduc Baltique (route : Russie – passage sous la Mer Baltique – Rostock en Allemagne) : 30 Mds de m; inconvénients : Baltique mer fermée avec déchets toxiques, mainmise de la Russie sur le projet, d’où réticences de la Suède et de la Pologne.

·        GALZI (route : Algérie - Sardaigne – Italie) : 10 Mds de m3 

·        Med Gaz (route : Algérie – Espagne) : 8 Mds de m3 dès 2009, puis 16 Mds de m3 en 2020

 

À signaler trois points critiques : le nœud gazier de Velke Kapusany (Slovaquie), à la frontière Ukraine / Slovaquie (110 Mds de m3) ; le terminal de Baumgarten (Autriche), point d’arrivée du gaz russe et, potentiellement, de Nabucco ; le passage Russie / Balkans via la Moldavie (30 Mds de m3). 

 

Les questions et le débat avec l’assistance font ressortir les points suivants :

·        « Rien n’est fiable » (sic), et rien n’est simple, dans la problématique du gaz naturel ! Certes la Russie est très fiable par certains aspects, il convient de coopérer avec elle (y compris peut-être dans le projet Nabucco), tout en contenant son influence.

·        Importance d’une Charte Européenne

·        Gazprom : volonté d’acheter des compagnies gazières européennes, marges importantes réalisées sur le prix du gaz, mais risque de perte de crédibilité en raison de comportements imprévisibles !

·        L’Ukraine a des capacités de stockage, mais à qui appartient ce gaz (Gazprom, Ukraine, mafieux) ? Beaucoup d’opacité en Ukraine, voire une opacité souhaitée !

·        Dans le contentieux gazier entre Kiev et Moscou, l’accord du 19 janvier 2009 est mal connu

·        Certaines prévisions laissent entendre qu’en 2030 ni Nabucco, ni le gazoduc Baltique ne seront faits, la réparation de la « route » via l’Ukraine étant plus économique.

·        Des sociétés françaises sont bien placées pour intervenir sur ces projets, encore faut-il qu’il y ait des appels d’offres !

 

Pierre FAYOLLE

 

photo de la soirée - carte des gazoducs

Jean-Paul VÉZIANT

Principaux gazoducs et oléoducs en Europe