Groupe de Paris des Anciens Élèves du Lycée Claude-Fauriel de Saint-Étienne

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Samedi 19 octobre 2013
À la découverte des Sources du Nord

le compte-rendu   les photos

compte-rendu de la visite

Samedi 19 octobre 2013, une trentaine d’Anciens de Fauriel se sont retrouvés à la sortie du métro Télégraphe dans le 20e arrondissement de Paris.
Nous y avions rendez-vous avec Jean-Luc LARGIER, stéphanois d’origine et habitant du quartier. Jean-Luc LARGIER est le créateur et le président de l’Association Sources du Nord – Études et Préservation (ASNEP).
Assisté d’Emmanuel DUMONT, lui aussi lié à Saint-Étienne puisqu’il y a été élève à l’École des Mines, il nous a servi de guide tout au long de la matinée et nous a permis des découvertes passionnantes.

Les Sources du Nord sont les eaux captées sur les collines du nord-est de Paris (quartiers de Belleville et de Ménilmontant, villes du Pré-Saint-Gervais et des Lilas). À partir du XIIe siècle un réseau hydrographique a été mis en place pour alimenter en eau principalement des abbayes et quelques fontaines de la capitale, probablement sur la base d'anciennes canalisations romaines. Un ensemble d'aqueducs a été progressivement aménagé, d'abord aérien puis souterrain, avec sur leur trajet des regards.

C’est une double histoire que nous a contée Jean-Luc LARGIER : d’abord l’histoire de la construction de ce réseau hydrographique au cours des siècles, mais aussi celle, plus récente, mais non moins passionnante, des actions menées pour la préservation des vestiges de ce réseau dont l’utilisation a cessé au XIXe siècle.

Deux réseaux différents peuvent être distingués parmi les Sources du Nord, un premier appelé « Eaux de Belleville » qui exploitait l'eau du versant sud des collines et l'acheminait vers des lieux situés à l'est de l'actuel boulevard Sébastopol/boulevard de Strasbourg et un autre appelé « Eaux du Pré-Saint-Gervais » qui exploitait le versant nord et acheminait l'eau à l'ouest de ces boulevards.

Le réseau des Eaux de Belleville, aussi appelé Eaux de Savies (ancien nom de Belleville), fut mis en place par les religieux de l'abbaye de Saint-Martin-des-Champs, située à l'endroit de l'actuel musée des Arts et Métiers (3e), et par les Templiers, installés dans l'ancien quartier des Templiers (3e). Plus tard d'autres bâtiments furent reliés à ce réseau :
• l'abbaye de Saint-Antoine-des-Champs (actuellement hôpital Saint Antoine, (12e)
• l'hôtel Saint-Pol (4e)
• l'hôtel des Tournelles (3e)
• l'hôpital Saint-Louis (10e)

Le principe était de récupérer l'eau de pluie tombée sur les collines. Cette eau traverse les sols, d'abord une couche perméable (marne blanche), puis une couche imperméable (argile verte). L'eau est ensuite drainée par des « pierrées » (réseau d'eau en pierres sèches, sans mortier) jusqu'à la citerne d'un regard. Un regard concentre plusieurs pierrées. L'eau évacuée du trop-plein de la citerne est alors déversée via un aqueduc, jusqu'aux divers points de distribution (en général des fontaines publiques). L’eau ainsi acheminée était d’assez bonne qualité puisqu'elle s’était assainie en traversant différentes couches. Les pierrées souterraines, dont on ne connaît pas aujourd'hui toute l'étendue, étaient signalées en surface par des bornes, afin d'être préservées et protégées (voir ci-dessous la photo d’une des bornes qui ont été conservées).

Le premier ouvrage que nous avons visité est un des plus connus. Il s’agit du regard de la Lanterne. Son nom lui vient du clocheton présent au-dessus du dôme, qui servait à l'époque de système de ventilation et d'éclairage naturel. Il constituait le point de départ du Grand aqueduc de Belleville. L’édifice est aujourd’hui entouré de constructions datant des années 1970. Il a été construit entre 1583 et 1613, vraisemblablement en lieu et place d'un monument plus ancien dont la seule trace subsistante est une plaque écrite en vieux français située dans le regard. Ce regard est resté inchangé depuis le XVIIe siècle. La construction en est remarquable. On peut y voir l’arrivée des « pierrées » drainant l’eau venant des collines voisines, le bassin dans lequel l’eau se déverse pour se décanter, ainsi qu’un tronçon de l’aqueduc souterrain qui desservait des fontaines et des bâtiments de la rive droite.

Sur notre parcours, nous avons également visité le regard Saint-Martin situé rue des cascades, face à la rue des Savies. On suppose que le regard actuel a remplacé un ouvrage plus ancien et plus modeste. Au-dessus de la porte d’entrée, sur le fronton, une inscription en latin prouve que les religieux de l'abbaye de Saint-Martin-des-Champs et les Templiers avaient usage de cet aqueduc qu'ils entretenaient à frais communs.

Rue des cascades, nous avons également visité le regard de la Roquette ainsi que le regard des Messiers. À l’origine, tous deux faisaient partie du réseau alimentant l'abbaye de Saint-Antoine-des-Champs.

Si divers regards, dont notamment le regard de la Lanterne, était classés monuments historiques depuis longtemps, tel n’était pas le cas d’autres ouvrages et des aqueducs. Quand Jean-Luc LARGIER et le groupe de bénévoles qu’il a progressivement constitué autour de lui ont commencé à s’intéresser aux vestiges des Sources du nord, beaucoup d’ouvrages avaient déjà été détruits dans le cadre d'opérations d’urbanisation et d’autres étaient menacés. Ce qui subsistait était à l’abandon et servait parfois de dépotoir. L’ASNEP (Association Sources du Nord – Études et Préservation) a entrepris un patient travail en vue de préserver ces éléments du patrimoine parisien. Dans les années 1990, alors que le classement en monument historique n’était pas encore intervenu pour les aqueducs et les bornes de signalisation, un projet immobilier risquait de détruire un important tronçon d’ouvrages souterrains et des bornes. L’architecte et le promoteur étaient dans leur bon droit puisque ces éléments n’étaient pas protégés. L’ASNEP est néanmoins allée les trouver pour leur expliquer les enjeux liés à la conservation de ce patrimoine. Le pouvoir de persuasion de Jean-Luc LARGIER, allié au fait que le promoteur et l’architecte étaient sensibles à cette problématique, ont fait que les plans ont été revus pour réduire les destructions au strict minimum. Le promoteur a notamment accepté que les parkings soient sur deux niveaux au lieu d’un seul. Nous avons pu constater de visu le résultat : Jean-Luc LARGIER nous a conduits dans l’immeuble et il a ouvert une porte métallique qui semblait commander l’accès à un banal local technique ; en fait nous avons découvert, parfaitement conservé un important tronçon de l’aqueduc souterrain.
Au prix d’un important travail, l’ASNEP a demandé le classement de l'ensemble des ouvrages des Eaux de Belleville en monument historique. La commission habilitée à traiter de telles demandes a d’ordinaire pour interlocuteurs des professionnels. Lorsqu’elle a examiné le dossier présenté par l’ASNEP (composée uniquement de bénévoles), elle a indiqué qu’elle avait rarement vu des dossiers aussi bien constitués. Depuis 2006, l'ensemble des regards et aqueducs du réseau des Eaux de Belleville est désormais classé monument historique.

L’ASNEP a également obtenu de la Mairie de Paris que le nom « Place des Sources du Nord » soit donné à une place proche du parcours de l’aqueduc.

Au terme de cette captivante promenade-conférence, le groupe s’est retrouvé au restaurant « Les trois marmites » pour un déjeuner amical.
Jean-Luc LARGIER a ensuite répondu à diverses questions qu’avait suscitées la visite, nous montrant qu’il était intarissable sur le sujet.
Pour conclure, Christian VOLLE, président du Groupe de Paris, a vivement remercié Pierre-Marie VERCHÈRE d’avoir établi le contact avec Jean-Luc LARGIER qu’il avait connu à Saint-Étienne. Au nom de l'ensemble des participants, Christian VOLLE a félicité Jean-Luc LARGIER et Emmanuel DUMONT pour l’enthousiasme et l’érudition dont ils ont fait montre au cours de cette étonnante visite.

 

Christian VOLLE
 

 

photos de la visite

Plan des eaux de Belleville

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